
CAMEROUN - MUSQIUE
Bonjour Georges, nous sommes heureux de vous rencontrer aujourd’hui ; il y a longtemps que nous espérions cet échange avec vous afin de partager avec les autres votre grande expérience. Avant tout nous allons vous demander de vous présenter à nos lecteurs.
Georges Mvoandji : Je suis Georges Mvoandji, originaire du village Metep. Sur le plan professionnel je suis ingénieur informaticien et consultant international. Je me sens très honoré de répondre à vos questions.
On constate que vous êtes issus d’une famille d’artistes. Votre sœur Gisèle Mvoandji est aussi une brillante chanteuse. D’où vous vient cette vocation ?
Oui évidemment, nous sommes une famille d’artistes, nous avons eu beaucoup de chance dans ce domaine. Le frère jumeau à notre papa, le regretté Denis SANGNANG MBANG, était un très grand musicien. Il excellait dans la musique Vútè. Tous les matins, il nous réveillait avec les sérénades qu’il jouait sur son TƗ́MBƗ̀R, car nous habitions la même maison. Ceci a contribué à nous forger. À côté de cela notre père était un chrétien très engagé dans l’église. En particulier dans des chorales où il nous a tous orientés. Nous avons grandi dans cet environnement artistique. Vous avez certainement déjà entendu parler de mon frère ainé Gervais Mango, qui a été le premier à exceller dans ce domaine de la musique. Nous autres, l’avons naturellement tous suivi. Voilà pourquoi la réputation sur le plan musical de la famille Mvoandji va crescendo : nous avons été moulés dans le socle familial.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui souhaitent se lancer dans cette belle carrière musicale ?
Merveilleuse question ! Tout part du degré de considération qu’on accorde à la culture, le degré d’amour qu’on a pour son identité. Parce qu’en fonction de l’amour que vous exprimez pour votre identité et votre culture, tout ce qui vous viendra à l’esprit sera de promouvoir cette réalité. Bien plus, lorsqu’on prend conscience de la nature essentiellement mortelle de l’homme, il devient plus qu’inévitable de mettre en place des mécanismes pour transmettre aux générations futures ce que vous aurez, vous, appris. Je voudrais dire que chaque génération apporte quelque chose de nouveau. Par exemple, hier Papa Denis jouait uniquement au TƗ́MBƗ̀R, mais aujourd’hui comme vous avez pu le constater dans les titres du nouvel album de ma sœur cadette Gisele Mvoandji, nous avons pu allier au TƗ́MBƗ̀R, d’autres instruments de musique (piano, guitare basse, batterie, …etc.). Et demain, nos enfants à leur tour pourront contribuer à améliorer tout ceci avec les influences de leur époque. C’est ainsi que notre culture sera pérennisée et résistera aux évolutions du temps.
La langue Vuté rime avec les proverbes et les contes. Pouvez-vous nous donner un proverbe Vuté qui vous a accompagné au cours de votre vie ?
(Rires) J’en ai tellement mais je vais me limiter à un qui me tient particulièrement à cœur : « Nom Cué Ndoŋ cume » c’est-à-dire : "Il y a toujours quelque part, quelqu’un qui est plus puissant que vous". C’est un proverbe qui rappelle aux Vútè la puissance de l’humilité. On doit toujours se rappeler que personne n’a la science infuse. Ce dicton est en réalité une invite à une remise en question permanente, à la Socrate : « Je sais que je ne sais rien ».
Je vous laisse carte blanche pour conclure cet entretien ?
En guise de conclusion, je souhaiterais décliner ma vision. Je suis un Vútè et trop fier de l’être, parce que ma culture Vútè m’a donné un certain nombre d’acquis qui me permettent d’être un homme qui a de la valeur sur le plan social. C’est elle qui nous donne d’être des hommes intègres sur le plan moral, d’être des hommes forts parce que nous sommes des guerriers, « ma tani na neume dou neub keuban a ». Ma vision c’est de voir le Vútè exceller dans toute chose qu'il entreprend. Je veux voir la culture Vútè prêchée partout. On a essayé de le faire avec mes frères, partout où nous arrivons vous trouverez des chansons Vútè. Même lorsque nous sommes appelés à faire les choses pour l’État du Cameroun, on trouve toujours un moyen d’y apporter une coloration Vútè . C’est la même chose que je souhaite pour tous les Vútè du Monde. On ne doit pas avoir honte de nous, cessons d’être ce peuple habitué à occuper les dernières places. Nous devons être un peu plus conquérants, un peu plus ambitieux.
Je souhaite que sur le plan professionnel, le Vútè se distingue partout où il exerce. Les Vútè ne doivent plus se limiter à de petites fonctions qui ne leur permettent pas de « posséder » le Monde. Je crois que nous avons tout le potentiel nécessaire. Faisons-en juste une exploitation judicieuse et vous verrez que le peuple Vútè cessera d’être un peuple des laissés-pour-compte.
Personne d’autre que nous même ne fera cesser ces considérations parfois pessimistes dont sont souvent victimes les Vútè. Nous stopperons cela que par la qualité de notre travail, la qualité de nos réalisations. Nous occupons des postes dans l’Administration, c’est la qualité du service rendu à travers notre travail qui redorera la dignité au peuple Vútè. Je vous en remercie !
Merci d’avoir bien voulu répondre sincèrement à nos questions.
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